Pour ce service ultime, nous nous tournons vers une figure mythique qui a défini le whisky non par sa distillation, mais par son vieillissement. Michel Couvreur est un visionnaire dont l'approche, souvent résumée par sa citation "80% du whisky se fait dans le fût", a révolutionné les conventions.
Né en Belgique, homme d'affaires prospère et connaisseur du vin de Bourgogne, Michel Couvreur est tombé amoureux du whisky écossais dans les années 1970. Frustré par la standardisation, il a pris une décision radicale et audacieuse : se concentrer uniquement sur la maturation.
Philosophie : Il n'a jamais distillé. Il achetait des new make spirits (le distillat jeune) directement auprès de distilleries écossaises de caractère (gardées secrètes) et les transportait en France pour les faire vieillir.
Les Chais de Bouze-lès-Beaune : Le lieu de vieillissement est emblématique. Les fûts sont logés dans des caves creusées à même la roche en Bourgogne, offrant une hygrométrie (humidité) et une température constantes. Cet environnement unique, saturé d'arômes, permet une maturation lente et harmonieuse, favorisant l'échange intense entre le whisky et le bois.
L'Obsession du Fût : Michel Couvreur était un précurseur dans la gestion des fûts. Il parcourait l'Espagne, sélectionnant et spécifiant méticuleusement des fûts ayant contenu les meilleurs vins de Xérès (Sherry) – Fino, Oloroso, Pedro Ximénez. Il allait jusqu'à faire des "réassaisonnements" des fûts avec du Xérès pour garantir la qualité et l'activité du bois, considérant le passé du fût comme l'élément primordial du goût.
Artisanat : Sa production est restée une affaire d'artisanat d'excellence. Les whiskies sont mis en bouteille sans filtration à froid et sans coloration, souvent à des degrés d'alcool élevés pour préserver l'intensité.
Le choix du Michel Couvreur Édition Tourbée (souvent baptisé Overaged, The Peat, ou Special Vatted) démontre la capacité de sa Maison à magnifier même les distillats fumés les plus intenses grâce à la maturation.
Le Distillat : Il s'agit d'un Vatted Malt (assemblage de Single Malts) ou d'un Single Malt, issu de distillats écossais fortement tourbés (Islay ou Highlands).
L'Influence du Fût : Le mariage avec ses fûts de Xérès (Sherry) actifs est la clé. Là où la tourbe brute d'Islay peut être intense, la maturation dans les caves de Bouze et l'influence des fûts de Xérès (fûts secs de Fino ou plus doux de Pedro Ximénez) viennent adoucir la fumée, l'arrondir et l'enrichir. La fumée se transforme en une élégance fumée complexe, avec des notes de fruits secs, d'épices douces, et une richesse vineuse.
Nous concluons avec l'œuvre de Michel Couvreur, le maître-assembleur et visionnaire qui a transformé la maturation en un art à part entière. Dès les années 1970, il a établi ses chais à Bouze-lès-Beaune en Bourgogne, opérant en tant qu'entité unique, convaincu que "90% de la qualité d'un whisky provient du fût utilisé".
Bien qu'il n'ait pas distillé, l'engagement de Couvreur envers la qualité de la matière première était total, ce qui fait écho à l'approche de distilleries comme Rozelieures et Bruichladdich :
Le Grain Ancien : Dans sa quête d'excellence, il allait jusqu'à faire cultiver la Bere Barley (orge Bere), la plus ancienne variété écossaise, notamment dans les Orcades. Réputée pour ses qualités aromatiques, cette orge confère une richesse et une complexité intrinsèques au distillat, bien avant qu'il n'arrive en Bourgogne.
L'Eau : Il importait également l'eau du célèbre Loch Katrine pour la réduction.
Le Distillat : Il sélectionnait des new make spirits écossais, y compris ceux dotés d'une légère tourbe, pour composer ses cuvées fumées.
Pour l'Overaged Malt Whisky 43% vol (Édition Tourbée), Couvreur associait un distillat tourbé de haute qualité (souvent issu d'orges anciennes) à son expertise incomparable des fûts :
Le Choix du Xérès : Le vieillissement se déroulait dans ses précieux fûts de Xérès (souvent Pedro Ximénez ou Oloroso, notamment en partenariat avec des maisons comme Emilio Lustau), au sein de ses caves souterraines.
L'Impact : L'humidité constante des caves et la qualité du bois transforment la fumée brute en une élégance fumée sophistiquée. Le vieillissement magistral confère des notes de fruits secs, de miel, de rancio et une volupté impressionnante, sublimant la trame aromatique de l'orge ancienne.